Le marais


Les marais constituent une des richesses de la commune, ainsi de tout temps, ils ont donné poissons et gibiers d’eau en abondance. Les terrains régulièrement inondés par les deux rivières ont permis la culture de plantes nécessitant une grande quantité d’eau telles le lin, le chanvre et plus récemment le maïs.

Dans les tourbières


Si, au grès d’une promenade, vous flânez du « Moulin Neuf » à « Gouge », vous marcherez sur un sol noirâtre et spongieux, qui tremble un peu sous le pas. Naguère, c’était le domaine de grandes herbes, aux tiges triangulaires et coupantes ; les « rouches ». Elles servaient autrefois de litières aux animaux et étaient le refuge des braconniers. Ces pantes sont des « carex » qui, en se décomposant par la racine, avec les sphaignes (mousses très spongieuses) vont constituer la tourbe. Travail permanent et lent de la nature.

Cette roche organique contient 60 % de carbone. C’est un combustible médiocre, dégagent beaucoup de fumée et brulant avec une petite flemme bleue claie. Elle fut pourtant utilisée comme combustible de substitution lors des pénuries de charbon qui frappèrent la France durant la première et la seconde Guerre mondiale. Ces tourbières ont aussi livré des vestiges archéologiques nombreux, particulièrement bien préservés grâce à leur immersion dans ce milieu stagnant.

Les tourbières de la vallée de l’Osme sont exploitées, en 1914, par Lucien Chauvaud, Edouard François, Georges Masson et la famille Boucardeau, Emilien Vanier, forgeron-serrurier, confectionne les premiers louchets à main. À la demande de la maison Fouilland d’Angoulême qui ouvre une tourbière à « la Fontaine des Eaux Segrain » (Chantemerle), vers 1940, Jean Vanier perfectionne le louchet. Henry Lamy construit les bâtis en bois. Messieurs Lecreux et Peraud de la Maison Worms ouvrent alors une autre tourbière à proximité de l’autre.

Primitivement, l’extraction se fait à l’aide d’un louchet. C’est une sorte de bêche, à fer étroit, qui sert à la fois de pelle et de louche, donnant au combustible une forme de brique allongée.
Secondé par quelques ouvriers, Jean-Louis VANIER entreprend la construction des appareils, dans son atelier de Saint-Fraigne. Les commandes affluent, grâce aux recommandations des premiers clients, en provenance de Paris, de Bordeaux, de Poitiers, de Châtellerault et de la Rochelle. Le chantier à Chantemerle prend de l’extension. Une trentaine d’ouvriers sont recrutés sûr, pour les deux exploitations.
Dans les années 1950, commencent les travaux d’assainissement de la vallée de l’Osme et de ses affluents. L’été, le lit des rivières est à sec. Les tourbières se dessèchent. L’environnement en est totalement modifié. Cependant, le site reprend, peu à peu, son état primitif grâce au nouveau plan élaboré par le conservatoire d’espaces naturels de Poitou-Charentes.

Restauration d'une zone humide


Les vallées de l’Aume et de la Couture ont progressivement perdu leur intérêt biologique et leur caractère paysager par suite d’assainissement en vue de l’intensification agricole. Essentiellement composé d’espaces marécageux et de prairies alluviales dans les années 1950, ce secteur est devenu aujourd’hui un vaste ensemble agricole de quelque 2 500 ha de terres cultivées, au sein desquelles quelques zone humides tourbeuses relictuelles substituent encore.
Cette évolution marquée a localement provoqué une pénurie de réserves d’eau naturelles et réduit la capacité du milieu à fournir des zones d’expansions des crues. Par ailleurs, des études récentes sur la qualité de l’eau témoignaient de concentration en nitrates ponctuellement supérieurs aux normes autorisées…

Face à ce constat alarmant, le Syndicat hydraulique du bassin de l’Aume-Couture (SIAHBAC) adoptait en 1995 un protocole d’intervention destiné à préserver la qualité et la quantité de la ressource en eau sur le bassin.

Rapidement, le constat est fait que des terrains pourraient facilement être inondés en maintenant quelques barrages mobiles en position haute. L’idée de préserver la ressource en inondant volontairement des terrinas commence alors faire son chemin.

À cette date, le secteur aujourd’hui appelé « Marais de Saint-Fraigne » est un espace entièrement cultivé maïs. Ces terrains possédant un fort potentiel d’inondabilité, la perspective de remise en eau se focalise rapidement sur cet ensemble de 4 ha d’un seul tenant.

Pour atteindre cet objectif, le Syndicat a dû convaincre des exploitants de la zone à remettre en eau leurs parcelles jusque-là cultivées, avec trois objectifs affichés :

  • Réhabilitation du marais permettant le retour de plusieurs dizaines d’hectares de terres cultivées en zone humide
  • Maintien du niveau de la nappe d’accompagnement de la rivière à son maximum pour constituer des réservoirs d’eau naturels
  • Piège des nitrates en aménageant un espace entre la rivière et les terrains agricoles.

Après deux années d’expérimentation et d’intense concertation locale pour faire accepter la démarche aux exploitants, puis trouver des moyens financiers afin de mener à bien le projet, le SIAHBAC a recherché des partenaires pour pérenniser cette action.

Contacté en 1997, le Conservatoire d’espaces naturels de Poitou-Charentes s’est intéressé à ce projet ambitieux et exemplaire de réhabilitation d’une zone humide à partir de terres cultivées. Avant d’engager une intervention foncière, préalable incontournable à une gestion pérenne du site, la structure a lancé une étude écologique, nécessaire pour argumenter et justifier le financement possible d’acquisitions sur ce territoire. L’objectif de ce diagnostic était ainsi de démontrer l’intérêt scientifique du site et sa capacité, après trois ans de remise en eau, à accueillir une flore et une faune patrimoniale. Le diagnostic mené en 1998 démontre que le milieu voit réapparaitre une flore et une faune exceptionnelle.

Les arguments scientifiques ont convaincu le Conservatoire de développer une action de maîtrise foncière amiable. Ainsi, en achetant et/ou en proposant des terres en échanges aux propriétaires et exploitants présents sur le site, le conservatoire tente ainsi depuis l’année 2000, en partenariat avec la SAFER, la Chambre d’agriculture et les acteurs agricoles locaux d’obtenir une maîtrise foncière sur environ 35 hectares afin d’y développer une action de gestion durable en faveur de la biodiversité et de la ressource en eau.

Grâce à la participation du Conseil général, de la Région, de l’Europe et de l’Agence de l’eau Adour-Garonne, le Conservatoire est aujourd’hui propriétaire d’environ 20 hectares sur le marais, et un travail de gestion s’engage en faveur du milieu et des espèces inventoriées. Grâce à ce travail, les marais de Saint-Fraigne ont retrouvé leurs aspects d’origine et sont redevenus d’extraordinaires réserves naturelles pour la faune et la fore des milieux humides.

La randonnée du patrimoine